L’éducation haïtienne traverse depuis plusieurs années une période de profondes réflexions et de remises en question. Dans un contexte social et économique fragile, la qualité de l’enseignement et la pertinence des méthodes pédagogiques sont au cœur des débats. C’est dans ce cadre que Nesmy Manigat, ancien ministre de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle, a pris la parole pour éclairer l’opinion publique sur les réformes récentes et les défis persistants du système éducatif haïtien.
🎓 Un système éducatif en quête de transformation
Selon Nesmy Manigat, l’école haïtienne ne peut plus fonctionner avec les mêmes outils qu’il y a trente ou quarante ans. Les méthodes d’enseignement basées sur la mémorisation mécanique — où l’élève devait simplement “apprendre par cœur” — ont montré leurs limites.
Aujourd’hui, l’enjeu est de passer d’un apprentissage de répétition à un apprentissage par renforcement et compréhension.
L’objectif est clair : permettre à chaque élève de comprendre, d’analyser et d’appliquer les connaissances acquises plutôt que de simplement les réciter.
« Un élève qui comprend ce qu’il apprend devient un citoyen capable de réfléchir et d’agir pour transformer sa société », a souligné Manigat.
🗣️ Le rôle central de la langue maternelle
Parmi les réformes mises en avant figure la promotion du créole haïtien comme langue d’enseignement.
Manigat plaide pour un système multilingue où le créole et le français cohabitent, mais où la langue maternelle joue un rôle clé dans la construction des savoirs fondamentaux.
Il rappelle que des milliers d’enfants échouent chaque année, non pas par manque d’intelligence, mais parce qu’ils sont enseignés dans une langue qu’ils ne maîtrisent pas.
« L’usage du créole à l’école n’est pas un recul, c’est une manière d’ouvrir l’accès à la connaissance pour tous les enfants haïtiens. »
🧭 De l’éducation civique à l’éducation à la citoyenneté
Autre point central abordé : la refonte du cours d’éducation civique et morale, désormais remplacé par l’éducation à la citoyenneté.
Cette nouvelle approche vise à former des citoyens responsables, engagés et conscients de leurs droits et devoirs.
Il ne s’agit plus seulement d’enseigner des règles ou des valeurs abstraites, mais de mettre les élèves en situation de réflexion et d’action sur la vie collective, la démocratie, la tolérance et le respect de l’autre.
Cette réforme entend adapter l’école haïtienne à la réalité du monde moderne : celui de la participation citoyenne, de la pensée critique et du vivre-ensemble.
🏫 Une école adaptée à la société haïtienne
Pour Nesmy Manigat, la réussite des réformes éducatives dépend de leur ancrage dans la culture et la réalité haïtiennes.
Le système éducatif doit être endogène, c’est-à-dire pensé à partir des besoins, des valeurs et des langues du pays.
Cela signifie valoriser les savoirs locaux, les traditions communautaires et les capacités d’innovation des jeunes.
Il insiste également sur la nécessité de former les enseignants à ces nouvelles approches pédagogiques, car sans une mise à niveau du corps professoral, aucune réforme ne peut réussir.
💡 Vers une éducation citoyenne, moderne et inclusive
Les propos de l’ancien ministre traduisent une volonté de moderniser l’école haïtienne sans renier ses racines.
L’éducation doit être un outil de transformation sociale, capable de réduire les inégalités et de préparer les jeunes à participer activement au développement du pays.
Ces réformes ne sont pas sans défis : manque de moyens, infrastructures déficientes, instabilité politique.
Mais elles ouvrent une voie vers une école plus juste, plus efficace et plus humaine, où chaque élève haïtien peut apprendre dans sa langue, comprendre son environnement et contribuer à bâtir l’avenir.
✍️ Conclusion
Le débat sur l’éducation en Haïti reste ouvert, mais la vision de Nesmy Manigat apporte une lueur d’espoir et de clarté.
Elle invite à repenser en profondeur la manière dont nous enseignons, dont nous apprenons et dont nous formons les citoyens de demain.
Car comme le rappelle l’ancien ministre, “une nation ne peut se développer durablement sans une éducation fondée sur la compréhension, la citoyenneté et la culture du pays.”



